L’ancien président Jimmy Carter accuse (certes) l’AIPAC, mais aussi des « chrétiens comme lui-même » d’être responsables du « parti pris pro-israélien » des médias sur Rawstory.com, le 17 décembre 2006 :

http://www.rawstory.com/news/2006/Former_President_Carter_blames_media_proIsrael_1217.html

Traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier, membre de Tlaxcala, le réseau de traducteurs pour la diversité linguistique. Cette traduction est en Copyleft pour tout usage non-commercial : elle est libre de toute reproduction, à condition de respecter son intégrité et de mentionner auteurs et sources. (article tiré du site quibla.net)

Dans une lettre adressée aux citoyens juifs américains, l’ancien président Jimmy Carter attribue le « parti pris pro-israélien » des médias pour partie à une puissante organisation de lobbying qui n’est confrontée à « aucune voix divergente de quelque importance ». Mais il rejette le blâme principalement sur des « chrétiens comme je le suis moi-même ».

L’ouvrage récemment publié de Carter, Palestine – La paix, pas l’apartheid ! – a suscité des « remous », d’origine pour partie « intentionnelle », a indiqué l’ancien président des Etats-Unis à Newsweek.

http://www.msnbc.msn.com/id/16240761/site/newsweek

« Un des objets du livre, c’était de susciter un débat que l’on n’entend qu’extrêmement rarement dans notre pays, et aussi d’ouvrir quelque possibilité de régénérer ou de reprendre les conversations de paix en Israël, inexistantes depuis six ans désormais – voilà : c’est pour ça que j’ai écrit ce livre », a déclaré Carter à Eleanor Clift, de Newsweek.

Carter a dit aussi à cet hebdomadaire que la grande « efficacité » et l’ « énorme influence » de l’AIPAC [American Israel Public Affairs Committee] avaient entraîné une « inhibition » des débats bien plus prégnante aux Etats-Unis que n’importe où ailleurs dans le monde.

« Dans notre pays, un quelconque débat (pour et contre), une quelconque sorte d’éditorial quelque peu incisif dans les principaux journaux, est quasi totalement inexistant », a déploré Carter.
« De plus, tout membre du Congrès qui désire se faire réélire est quasiment dans l’impossibilité de dire qu’il adoptera une position équilibrée entre Israël et les Palestiniens, ou qu’il insistera auprès d’Israël afin qu’il se retire à l’intérieur des frontières internationales, ou encore qu’ils s’attèleront à la protection des droits humains des Palestiniens – car s’il lève la langue sur ces questions, il est pratiquement certain de ne pas être réélu », a ajouté Carter.

Dans une lettre adressée aux juifs américains, Carter inclut aussi les chrétiens comme lui-même, dans la responsabilité de la limitation du débat.

« J’ai dit très clairement que je n’ai jamais clamé que les juifs américains contrôleraient les médias, mais j’ai redit que le parti pris écrasant en faveur d’Israël est dû à des chrétiens, comme moi, à qui on a enseigné depuis l’enfance à honorer et à protéger le peuple élu de Dieu [il y a ballottage… ndt] duquel a levé notre propre sauveur, Jésus Christ », écrit Carter.

« Un facteur supplémentaire, en particulier dans l’arène politique, est la puissance influence de l’AIPAC, qui exerce sa mission légitime consistant à expliciter les politiques actuelles du gouvernement israélien, et à susciter un maximum de soutien dans notre pays », poursuit-il.
« [Le problème, c’est qu’] il n’y a aucune expression d’opposition à cela », regrette Carter.

 

Le texte de la lettre de Carter, in extenso :

Adresse aux citoyens juifs d’Amérique

Au cours de ma récente tournée de dédicaces de mon livre, j’ai signé plus de 100 000 exemplaires, et j’ai été interviewé par plus de cent médias.

Le plus impressionnant fut pour moi ma rencontre avec les dirigeants du Consistoire de l’Agglomération de Phoenix, qui avaient annoncé, avant mon arrivée, qu’ils manifesteraient afin de protester contre mon bouquin. Quand ils m’ont invité à les rencontrer, j’ai immédiatement accepté.

Les six rabbins (trois hommes et trois femmes) et moi-même, nous fûmes les seules personnes présentes, à l’exception d’une équipe de cameramen sous la direction de Jonathan Demme, qui réalisait un documentaire sur moi et l’action du Carter Center. M. Demme a indiqué alors qu’il y avait [dehors] un groupe tout aussi important de citoyens juifs, qui manifestaient leur soutien à mon livre, et [plus important] à l’exhortation à la paix dont il se veut le vecteur.

Nous avons tout d’abord débattu du traité de paix que j’ai négocié [personnellement] entre Israël et l’Egypte, en 1979, ainsi que de la Commission sur l’Holocauste, dont j’ai annoncé la création à l’occasion du trentième anniversaire de la création d’Israël. Cinq de mes interlocuteurs avaient lu la totalité de mon livre, et un autre ne l’avait lu qu’en partie. J’ai répondu à leurs questions sur le texte et sur son titre : Palestine : La paix, pas l’apartheid !. J’ai souligné, comme je l’avais d’ailleurs fait tout au long de ma tournée de dédicaces, que le livre porte sur les conditions et les événements dans les territoires palestiniens, et non en Israël, où existe une démocratie comportant toutes les libertés dont nous jouissons aux Etats-Unis, et où les Israéliens, juifs et arabes, se voient garantir les mêmes droits, en tant que citoyens. [Rheûûûû ! Tonton, pourquoi tu tousses ? ndt]

Nous avons débattu du mot « apartheid », que j’ai défini comme la ségrégation forcée entre deux peuples vivant sur le même territoire, l’un d’entre eux dominant et persécutant l’autre. J’ai dit clairement dans le livre, et dans ma réponse à ces rabbins, que le système d’apartheid prévalant en Palestine n’est pas basé sur le racisme [Rheûûûû… Tonton, une tape dans le dos ? ndt], mais sur la convoitise d’une minorité d’Israéliens pour les terres palestiniennes et sur la répression des protestations qui en résultent, et qui impliquent la violence. Mgr Tutu, Nelson Mandela et d’éminents Israéliens, dont l’ex-procureur de la République Ben Yair, qui a été en fonctions sous des Premiers ministres tant du Likoud que du Parti travailliste, ont utilisé et explicité cette qualification en des termes bien plus durs que moi, faisant observer que cette cruelle oppression est contraire aux préceptes de la religion juive [Rheûûûû… Tonton, un verre d’eau ? ndt] ainsi qu’aux principes fondamentaux de l’Etat d’Israël. [Tonton, pourquoi t’es tout violet ? ndt]

Ayant voyagé partout dans la Terre Sainte au cours des trente-trois années écoulées, en particulier dans les territoires occupés, je suis qualifié pour décrire la situation à partir de mes propres observations. De plus, le Carter Center a supervisé les élections palestiniennes de 1996, de 2005 et de 2006, ce qui exigeait un engagement intime et exhaustif avec des citoyens palestiniens : des candidats, des édiles publics et aussi les plus hauts dirigeants politiques israéliens, qui contrôlaient les checkpoints partout à l’intérieur de la Cisjordanie et de la bande de Gaza, et toutes les facettes du déroulement de ces élections à Jérusalem Est [« toutes les facettes » = essentiellement, les bureaux de poste ! ndt]

J’ai dit très clairement que je n’ai jamais clamé que les juifs américains contrôleraient les médias [en effet, cela, tout le monde le sait ! ndt], mais j’ai réitéré que le parti pris écrasant en faveur d’Israël a pour origine des chrétiens comme moi-même, à qui on a enseigné depuis l’enfance à honorer et à protéger le peuple élu de Dieu [il y a ballottage, ndt], duquel a levé notre sauveur, Jésus Christ.

J’ai dit très clairement que je n’ai jamais clamé que les juifs américains contrôleraient les médias, mais j’ai redit que le parti pris écrasant en faveur d’Israël est dû à des chrétiens, comme moi, à qui on a enseigné depuis l’enfance à honorer et à protéger le peuple élu de Dieu [il y a ballottage… ndt] duquel a levé notre propre sauveur, Jésus Christ.

Un facteur supplémentaire, en particulier dans l’arène politique, est la puissance influence de l’AIPAC, qui exerce sa mission légitime consistant à expliciter les politiques actuelles du gouvernement israélien, et à susciter un maximum de soutien dans notre pays.

Or, il n’y a aucune expression d’opposition à cela

Je connais bien les actes d’extrême violence qui ont été perpétrés contre des civils innocents, et je comprends la peur qu’ont beaucoup d’Israéliens que les menaces contre leur sécurité et même contre leur existence, en tant que nation, restent présentes. J’ai redit ma condamnation catégorique de tous ces actes de terrorisme.

La question des propositions que je formule pour le Moyen-Orient m’ayant été posée, je les ai résumées par l’appel aux membres du Hamas et aux autres Palestiniens les exhortant à renoncer à la violence et à faire leur l’engagement pris par les nations arabes en 2002 : reconnaissance totale du droit d’Israël à exister en paix à l’intérieur de ses frontières légalement reconnues de 1967 (à modifier éventuellement par accord mutuel et des échanges de territoires). Cela serait conforme aux résolutions de l’Onu, à la politique officielle des Etats-Unis, à l’engagement pris à Camp David en 1978 et à Oslo en 1993, ainsi qu’aux principes du Quartette international.

« La Feuille de Route vers la paix »

Une mesure immédiate serait la reprise de conversations de paix entre Israël et les Palestiniens, interrompues désormais depuis six ans. Le président Mahmoud Abbas est le porte-parole officiel des Palestiniens, ainsi que le Président de l’Autorité nationale palestinienne et de l’Organisation de Libération de la Palestine, et il en a appelé de manière constante à des pourparlers de paix. J’ai demandé aux rabbins de rejoindre un effort visant à inciter le gouvernement israélien à se conformer à cette proposition.

De plus, j’ai fait observer que le peuple palestinien était privé des besoins vitaux élémentaires par les restrictions économiques qui lui sont imposées par Israël et les Etats-Unis, au motif que 42 % des Palestiniens ont voté en faveur des candidats du Hamas aux dernières élections. Des enseignants, des infirmières, des policiers, des pompiers et d’autres employés ne sont plus payés, et l’ONU a fait savoir que les réserves de nourriture, à Gaza, équivalent à celles dont disposent les familles les plus pauvres de l’Afrique subsaharienne, la moitié des familles survivant en ne faisant qu’un unique repas quotidien. Mon autre requête était que les citoyens juifs américains contribuent à rendre moins lourd le calvaire des Palestiniens.

Le président du groupe, le Rav Andrew Straus, suggéra alors que je dise clairement à tous les juifs américains que mon utilisation du terme « apartheid » ne s’applique pas à la situation à l’intérieur d’Israël [ah bon ? voir l’ouvrage de Susan Nathan : L’Autre côté d’Israël… ndt], que je reconnais la profonde préoccupation des Israéliens causée par la menace terroriste et les autres actes de violence commis par certains Palestiniens, et que la majorité des Israéliens veulent sincèrement vivre en paix avec leurs voisins. Le but de cette lettre est précisément de rappeler ces points.
Nous avons ensuite formé un cercle en nous tenant par la main, tandis qu’un des rabbins priait. J’ai dédicacé des exemplaires de mon livre, comme mes interlocuteurs m’en avaient prié, et l’aumônier juif des armées, le Rav Bonnie Koppell m’a offert un livre de prières.
J’ai consacré une bonne partie de ma vie d’adulte [conscient] à tenter d’amener la paix à Israël, et ma prière personnelle sera pour que tous ceux d’entre nous qui veulent voir les Israéliens jouir d’une paix durable avec leurs voisins se joignent à cet effort collectif.

Sincèrement

Jimmy Carter

[Lien vers la lettre de Carter, sur le site du Carter Center :
http://www.cartercenter.org/news/pr/carter_letter_121506.html ]

Former President Carter blames media's 'pro-Israel bias' on AIPAC and 'Christians like me'

http://www.rawstory.com/news/2006/Former_President_Carter_blames_media_proIsrael_1217.html

 

RAW STORY

Published: Sunday December 17, 2006

In a letter addressed to Jewish citizens of America, former President Jimmy Carter explains the media's "pro-Israel bias" partly on a powerful lobbying organization which faces no "significant countervailing voices," but primarily puts the blame on "Christians like me."

Carter's recently published book, Palestine: Peace Not Apartheid, has caused a "stir," which was "partly intentional," the former president told Newsweek.

"One of the purposes of the book was to provoke discussion, which is very rarely heard in this country, and to open up some possibility that we could rejuvenate or restart the peace talks in Israel that have been absent for six years—so that was the purpose of the book," Carter told Newsweek's Eleanor Clift.

Carter also told the magazine that the "effectiveness" and "powerful influence" of the American Israel Public Affairs Committee (AIPAC) has resulted in more "inhibited" debates in the United States than nearly anywhere else.

"In this country, any sort of debate back and forth, any sort of incisive editorial comment in the major newspapers, is almost completely absent," Carter said.

"And any member of Congress who's looking to be re-elected couldn't possibly say that they would take a balanced position between Israel and the Palestinians, or that they would insist on Israel withdrawing to international borders, or that they would dedicate themselves to protect human rights of Palestinians—it's very likely that they would not be re-elected," Carter added.

In the letter addressed to American Jews, Carter also includes Christians like himself for limiting the debate.

"I made it clear that I have never claimed that American Jews control the news media, but reiterated that the overwhelming bias for Israel comes from among Christians like me who have been taught since childhood to honor and protect God's chosen people from among whom came our own savior, Jesus Christ," Carter writes.

"An additional factor, especially in the political arena, is the powerful influence of the American Israel Public Affairs Committee, which is exercising its legitimate goal of explaining the current policies of Israel's government and arousing maximum support in our country," Carter continues.

"There are no significant countervailing voices," Carter regrets.

Full text of Carter's letter:

A letter to Jewish citizens of America

During my recent book tour I signed more than 100,000 books and was interviewed on 100 news media outlets.* The high point for me was a meeting with leaders of the Board of Rabbis of Greater Phoenix, who announced before my arrival that they would demonstrate against my book. When they invited me to meet with them, I accepted immediately. The six rabbis (three men and three women) and I were the only ones present except for a camera crew under the direction of Jonathan Demme, who was making a documentary about me and the work of The Carter Center. Demme reported that there was an equally large group of Jewish citizens demonstrating in support of the book and its call for a path to peace.

We first discussed the peace treaty I negotiated between Israel and Egypt in 1979, and the Holocaust Commission I announced on Israel's 30th birthday. Five of them had read my book completely and one partially, and I answered their questions about the text and title of PALESTINE PEACE NOT APARTHEID. I emphasized, as I had throughout the tour, that the book was about conditions and events in the Palestinian territories and not in Israel, where a democracy exists with all the freedoms we enjoy in our country and Israeli Jews and Arabs are legally guaranteed the same rights as citizens.

We discussed the word "apartheid," which I defined as the forced segregation of two peoples living in the same land, with one of them dominating and persecuting the other. I made clear in the book's text and in my response to the rabbis that the system of apartheid in Palestine is not based on racism but the desire of a minority of Israelis for Palestinian land and the resulting suppression of protests that involve violence. Bishop Tutu, Nelson Mandela, and prominent Israelis, including former attorney general Ben Yair, who served under both Labor and Likud prime ministers, have used and explained the appellation in harsher terms than I, pointing out that this cruel oppression is contrary to the tenets of the Jewish faith and the basic principles of the nation of Israel.

Having traveled throughout the Holy Land during the past 33 years, especially within the occupied areas, I was qualified to describe the situation from my own personal observations. In addition, The Carter Center has monitored the Palestinian elections of 1996, 2005, and 2006, which required a thorough and intimate involvement with Palestinian citizens, candidates, public officials, and also the top political leaders of Israel who controlled checkpoints throughout the West Bank and Gaza and all facets of the elections in East Jerusalem.

I made it clear that I have never claimed that American Jews control the news media, but reiterated that the overwhelming bias for Israel comes from among Christians like me who have been taught since childhood to honor and protect God's chosen people from among whom came our own savior, Jesus Christ. An additional factor, especially in the political arena, is the powerful influence of the American Israel Public Affairs Committee, which is exercising its legitimate goal of explaining the current policies of Israel's government and arousing maximum support in our country. There are no significant countervailing voices.

I am familiar with the extreme acts of violence that have been perpetrated against innocent civilians, and understand the fear among many Israelis that threats against their safety and even their existence as a nation still exist. I reiterated my strong condemnation of any such acts of terrorism.

When asked my proposals for peace in the Middle East, I summarized by calling for Hamas members and all other Palestinians to renounce violence and adopt the same commitment made by the Arab nations in 2002: the full recognition of Israel's right to exist in peace within its legally recognized 1967 borders (to be modified by mutual agreement by land swaps). This would comply with U.N. Resolutions, the official policy of the United States, commitments made at Camp David in 1978 and in Oslo in 1993, and the premises of the International Quartet's "Roadmap for Peace." An immediate step would be the resumption of peace talks between Israel and the Palestinians, now absent for six years. President Mahmoud Abbas is the official spokesman for the Palestinians, as head of the Palestinian National Authority and the Palestine Liberation Organization, and has repeatedly called for peace talks. I asked the rabbis to join in an effort to induce the Israeli government to comply with this proposal.

In addition, I pointed out that the Palestinian people were being deprived of the necessities of life by economic restrictions imposed on them by Israel and the United States because 42% had voted for Hamas candidates in the most recent election. Teachers, nurses, policemen, firemen, and other employees are not being paid, and the U.N. has reported that food supplies in Gaza are equivalent to those among the poorest families in sub-Sahara Africa with half the families surviving on one meal a day. My other request was that American Jewish citizens help to alleviate their plight.
The chairman of the group, Rabbi Andrew Straus, then suggested that I make clear to all American Jews that my use of "apartheid" does not apply to circumstances within Israel, that I acknowledge the deep concern of Israelis about the threat of terrorism and other acts of violence from some Palestinians, and that the majority of Israelis sincerely want a peaceful existence with their neighbors. The purpose of this letter is to reiterate these points.

We then held hands in a circle while one of the rabbis prayed, I autographed copies of my book as requested, and Chaplain (Colonel) Rabbi Bonnie Koppell gave me a prayer book.
I have spent a great deal of my adult life trying to bring peace to Israel, and my own prayer is that all of us who want to see Israelis enjoy permanent peace with their neighbors join in this common effort.

Sincerely,

Jimmy Carter