Affaire du "Sentier II"
: 138 personnes et 4 banques renvoyées en
correctionnelle
Cent trente-huit personnes et quatre banques, dont la Société
générale et son PDG Daniel Bouton, ont été
renvoyées, vendredi 21
juillet, en correctionnelle dans l'affaire de blanchiment dite du
"Sentier II" entre la France et Israël, portant sur des
milliards
d'euros.
Quatre banques, la Société générale,
la Société marseillaise de
crédit, la Barclays-France et la Banque nationale du Pakistan sont
renvoyées en tant que personnes morales par la juge d'instruction
du pôle financier de Paris, Xavière Simeoni. Outre M. Bouton,
plusieurs cadres de ces quatre banques sont notamment prévenus
de "blanchiment aggravé" pour des faits s'étalant
de 1997 à fin 2001
dans ce dossier qui fait plus de 600 tomes.
Le parquet de Paris a requis début juillet
le renvoi de deux banques
seulement, la Société marseillaise de crédit et la
Banque nationale
du Pakistan, sur les huit qui avaient été mises en examen.
Mme
Simeoni, qui a signé son ordonnance jeudi, a suivi les demandes
du
parquet en ordonnant un non-lieu pour la BRED, l'American Express
Bank France, la Leumi-France et la banque libanaise Saradar, mais
elle a décidé du renvoi de la Société générale
et de la
Barclays-France.
UN ANCIEN PROCUREUR EN DÉTENTION
Ce dossier de blanchiment via des chèques
entre la France et Israël,
qui porte sur "des milliards d'euros" selon une source proche
du
dossier, avait été découvert lors de l'enquête
sur l'affaire dite du
Sentier, un vaste réseau d'escroquerie dans le quartier parisien
de
la confection au préjudice de banques et de compagnies
d'assurances au milieu des années 1990.
Cent vingt-quatre personnes avaient été
renvoyées devant la
justice, parmi lesquelles 85 ont été condamnées.
On retrouve les
noms de certaines d'entre elles dans cette nouvelle affaire.
Au total, dans "Sentier II", 198 personnes ont été
mises en examen,
dont 32 cadres ou dirigeants d'établissements bancaires pour tout
ou partie des infractions de "trafic d'influence, corruption passive,
blanchiment aggravé et recel de fonds provenant d'abus de biens
sociaux". Un ancien procureur adjoint au parquet de Bobigny,
Jean-Louis Voirain, qui avait passé huit mois en détention
provisoire
en 2003 avant d'être révoqué, est également
renvoyé devant la
justice. Six rabbins, dont deux sont en fuite, seront également
jugés.
CIRCUIT DE BLANCHIMENT
Un vaste circuit de blanchiment permettait notamment
à des
commerçants ou des particuliers français de dissimuler un
"délit
initial" de fraude fiscale, abus de biens sociaux, chèques
volés etc,
en échangeant, moyennant une commission, des chèques contre
de
l'argent liquide.
Pour permettre cette opération, les chèques étaient
présentés dans
des bureaux de change en Israël, où la réglementation
permet de
faire endosser un chèque contre le versement de sommes en
espèces par une autre personne que son destinataire.
Les chèques étaient ensuite adressés
par différentes banques
israéliennes à une "banque-correspondante" en
France, telle que la
Société générale. Mme Simeoni, qui a mis au
jour six filières
distinctes de blanchiment, a établi que les quatre banques
renvoyées étaient au courant de ce système, ce qu'elles
ont
toujours démenti.
Conclue en 2003 par la juge Isabelle Prévost-Desprez,
qui avait
renvoyé devant la justice les huit banques, l'instruction avait
été
complètement relancée après l'annulation en juin
2004 par la cour
d'appel de Paris de l'ordonnance de la magistrate pour vice de
forme. Mme Simeoni, qui a hérité de l'instruction, l'a reprise
depuis
le
début. Les prévenus, pour la plupart sous contrôle
judiciaire,
encourent dix ans de prison et de fortes amendes, jusqu'au double
des sommes blanchies.
Avec AFP
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