UN ANCIEN DU BÉTAR PARLE ! Dans les quartiers de Paris à forte concentration juive, il existe des milices. Si vous cherchez une adresse dans ces secteurs, simplement si vous y flânez, immanquablement quelqu'un vous accostera pour vous demander ce que vous voulez. Aux terrasses des cafés de la rue des Rosiers, on voit des bandes de jeunes aux cheveux gominés scruter la foule. Qu'un groupe de trois ou quatre Maghrébins passe par là et ils enfourchent leurs scooters et l'encerclent. Histoire de jalonner " leur " territoire. Le Bétar, fondé en 1929 par un sioniste radical, Vladimir Jabotinsky, et la LDJ (2), qui s'inspire de l'idéologie du rabbin Meir Kahana (2), fournissent les troupes de choc de ces milices. Dans un article précédant, Ali Khodja avait enquêté chez les islamistes radicaux
Cette fois, il a interviewé un ancien membre du Bétar. Mickael Toledano, un costaud de type méditerrannéen qui se donne des airs de dur de banlieue. Il m'a donné rendez-vous dans un bistro de la rue des Blancs-Manteaux (Paris IVème). " Quand j'étais môme, commence-t-il, mon père m'avait inscrit dans une école juive. Le grand frère d'un copain faisait partie du Tagar. Il nous attendait à la sortie pour nous parler des entraînements aux arts martiaux. Il nous vantait les vacances organisées en Israël, la pratique du Krav Maga(1). Il nous parlait de l'antisémitisme grandissant. La France s'arabisait, nous disait-il, il fallait que les juifs de ce pays se protègent et se battent s'il le fallait. Moi, je trouvais cela super. J'en ai parlé à mes parents. Au début, ils n'étaient pas très convaincus. Puis, un soir, nous sommes tous allés dîner avec les parents de mon copain. Devant la famille de celui-ci, à table, mon père m'a donné l'autorisation de rentrer au Tagar. Il avait été convaincu. Ali Khodja : Comment devient-on membre du Bétar ? Mickael Toledano : Tout repose sur la résistance à la douleur. Il faut apprendre à encaisser les coups. On est alors jugé apte à aller plus loin dans le mouvement. Pour ma part, j'ai eu la possibilité de m'entraîner du côté de Pontoise avec la LDJ (2) pour apprendre la guérilla. J'ai même appris à porter des coups mortels au Krav Maga (1). Nous apprenions ça au cas où nous aurions à appuyer l'armée israélienne pendant les combats. Je crois même que c'était l'État français qui finançait ces stages. A.K : Avez-vous exécuté des missions pour le Bétar ? M.T : Nous nous postions devant les synagogues et les écoles juives pour transmettre le message que nous avions reçu plus jeunes. Il fallait parler de sport et insister sur notre sentiment d'appartenance à une communauté qui doit se protéger. On expliquait aussi l'importance de l'alya (3). A.K. : C'est tout ? M.T. : Il y avait aussi des actions plus musclées, comme la protection des manifestations. On débarquait en scooter, casques sur la tête. On encerclait les opposants à nos idées et, à coups de matraque ou à mains nues, on les tabassait. J'ai participé à plusieurs actions dont la presse a parlé. Aujourd'hui, à cause de ça, je suis sous contrôle judiciaire pour violence en réunion. J'attends le jugement. J'espère bénéficier d'un sur-sis. Mais on ne sait jamais. Une chose est sûre, je laisse tomber. J'ai compris que les cadres du Bétar nous bourrent le crâne et nous manipulent. Je me prenais pour un modèle de la communauté. En fait, les autres juifs ne nous aiment pas. Ils nous fuient même (4). A.K : Comment expliquez-vous la liberté d'action laissée par l'État français à des organisations comme le Bétar ? M.T. : C'est simple, le Bétar, comme la LDJ, se servent de l'antisémitisme. Les agents de l'État ont peur, s'en prenant à ces organisations, de se faire taxer d'antisémitisme. Et puis, ils ne peuvent rien contre l'organisation de voyages en Israël ou des activités culturelles destinées aux jeunes juifs. Le Bétar et la LDJ occultent leurs activités violentes. De plus, ils sont toujours prêts à mettre en avant que se défendre est un droit. A.K. : Combien le Bétar et la LDJ (2) comptent-ils de membres ? M.T : Personnellement, j'en connais une centaine. On dit qu'ils seraient 300 à 500 miliciens. NOTES (1) en hébreu, " combat-rapproché, " technique de combat créée par les sionistes. (2) " Ligue de Défense Juive. " Le rabbin Meir Kahana est le fondateur de l'organisation extrémiste sioniste Kach. Il est mort assassiné dans un hôtel de New York. La LDJ est interdite aux États-Unis et au Canada. Pas en France ! (3) Pour un juif de la diaspora, le fait de s'installer en Israël. (4) Le Bétar est néanmoins cité de manière favorable, comme une organisation de jeunesse juive, dans l'hebdomadaire " Actualité Juive ". http://www.recherches-sur-le-terrorisme.com
http://www.recherches-sur-le-terrorisme.com/Documentsterrorisme/betar-toledano.html |